TERRITORIA : 30 ans d’innovation dans les territoires Et maintenant ?

​Le 21 septembre 2016, la journée anniversaire de Territoria, dans les locaux de la Caisse des dépôts à Paris a été riche en réflexions et échanges sur l’évolution de l'innovation publique dans un monde territorial plus que jamais en mouvement.

Ouverte par le sénateur Alain Gournac, Président de Territoria, et Marc Abadie, directeur Réseau et Territoires de la Caisse des dépôts, les débats ont rassemblé de nombreuses personnalités du monde territorial.

Parmi les interventions remarquables, dont je reprendrai des extraits régulièrement dans ces pages, un moment fort avec Jean-Paul Delevoye, ancien président du CESE, entre autres fonctions.

« La gestion d’un territoire n’est pas la gestion de ses ressources, c’est (se demander) : quelles sont les politiques que je dois mener pour attirer les capitaux du monde entier et les jeunes du monde entier ? Dans cet aspect, les territoires les plus attractifs sont ceux qui sauront offrir une authenticité, une joie de vivre, un métier, de l’environnement.

…/…Chaque fois que l’on crée un environnement, on modifie le comportement des gens. Quels sont les effets comportementaux des politiques publiques ? De plus en plus de Maires voient des fragmentations. On ne vit plus avec l’autre, on cohabite avec l’autre. Paris n’est plus la ville de la mixité sociale, c’est le quartier latin, le quartier turc, le quartier chinois. Quand on ne vit plus avec l’autre, on fantasme sur l’autre, on imagine ce qu’il est, d’où aujourd’hui le fantasme de l’arabe, du musulman, comme hier du juif, etc.

Nous avons, sur le plan du terrain, à trouver des moyens nouveaux, à partir non pas de structures mais de personnes inspirantes, à faire en sorte que l’on retrouve le lien de dialogue entre les gens ; pas la stigmatisation de la différence mais l’enrichissement de la différence. Nous sommes dans un moment où le système doit se remettre en cause, y compris avec le sens du débat. Je crois beaucoup non pas à la démocratie participative parce que l’on demande aux gens de réagir par rapport à des émotions, mais à la démocratie délibérative : « Quelles sont les questions essentielles que vous voulez poser ? Je vais vous donner les moyens de vous forger une conviction. »

Nous voyons bien que si nous ne responsabilisons pas nos concitoyens, si nous ne leur permettons pas de devenir acteurs par un engagement de la politique publique, on ne construira pas des responsabilités publiques sur des irresponsabilités individuelles. Nous sommes dans un moment extrêmement essentiel car ce qui est important n’est pas la maîtrise des budgets mais l’apaisement des peuples et la mobilisation des peuples autour d’espérances nouvelles.

Aujourd’hui, dans le monde entier, l’offre politique est contestée. Il faut que nous nous interrogions. Je ne veux pas du tout être désagréable, j’essaie de comprendre et j’ai tellement de respect pour les gens qui s’engagent ! Nous devrions tous défendre nos Députés, nos Ministres, nos Présidents quels qu’ils soient. S’il n’y a plus d’hommes et de femmes qui s’engagent, c’est catastrophique.

En revanche, nous pouvons essayer de leur dire : « Arrêtez de rester sur votre piédestal et regardez la réalité. » …/… Les politiques ne se rendent pas compte que s’ils acceptaient d’épouser les forces citoyennes potentielles et de les mobiliser, non pas demander aux citoyens d’obéir mais de faire en sorte qu’ils adhèrent à un enjeu de société, ils bénéficieraient dans ce pays d’une force de mobilisation incroyable et plus essentielle que jamais ».