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Rencontres Nationales de l’Eau Publique : ce qu’il faut retenir de la première édition

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Rencontres Nationales de l’Eau Publique : ce qu’il faut retenir de la première édition

Le 1er octobre, France eau publique (FEP) organisait ses premières rencontres au sein de l’Agence nationale de cohésion des territoires, à Paris. Le thème choisi : « Territoires en mutation : quelles solutions des acteurs publics de l’eau ? » Retour sur les temps forts de cette matinée organisée en partenariat avec ID.

Participation

Organiser des rencontres en pleine période Covid était déjà en soi un événement. France Eau Publique a réussi le pari, le 1er octobre, de rassembler à la fois 150 participants dans l’amphithéâtre de l’Agence nationale de la cohésion des territoires et une centaine de personnes sur le streaming diffusé sur YouTube.

Respect des territoires

Née en 2012, la FEP rassemble des collectivités et opérateurs publics engagés dans une démarche de partages de bonnes pratiques, de mutualisation des moyens, de renforcement mutuel et de promotion de la gestion publique de l’eau. Cette matinée a été l’occasion de défendre ce modèle tout en parlant de gouvernance, climat, économie. « Il est important d’avoir une fédération qui porte la gestion publique de l’eau. Elle est excellente à certains endroits, moyenne dans d’autres. On a envie de progresser ensemble, de trouver de l’expertise et des solutions », annonce en préambule Christophe Lime, le président. La FEP aide également les collectivités qui pensent à un retour en gestion publique de l’eau. Et elles sont nombreuses. «Nous sommes dans le respect des territoires. On les accompagne dans leurs réflexions, on les rassure et on leur dit que c’est possible. Mais en aucun cas, on ne prend de décisions pour elles », assure le président.

Placer l’eau au cœur des politiques publiques

L’eau, un bien à la fois accessible mais rare, a un rôle clé à jouer dans un contexte de crises multiples. Les intervenants ont été invités à échanger autour du modèle de gestion publique de l'eau, en se demandant comment l’eau pouvait réinventer la gouvernance et placer l’homme au cœur des politiques publiques.

Choisir le modèle de la gestion publique de l’eau, c’est dépasser les clivages partisans pour s’engager au service de l’intérêt général. Ce choix permet à la collectivité de s’emparer à nouveau du prix de l’eau et en faire un outil de solidarité et d’équilibre territorial. Pour Hervé Paul, président de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) et président de la régie Eau Azur, intervenant de la première table ronde : « chaque euro payé sur la facture alimente le service de l’eau : l’entreprise publique de l’eau se doit d’être aussi, voire plus performante, que l’entreprise privée de l’eau. »

Etat et collectivité, même combat

« On ne peut pas se contenter d'opposer l'échelon de proximité à l'échelon national. On doit se demander comment on va pouvoir avoir des acteurs et des échelons avec des concertations horizontales », affirme Magali Reghezza-Zitt, docteur en géographie et aménagement, membre du Haut Conseil sur le climat allait également dans le même sens. Un constat partagé par bon nombre d’intervenants dont Emmanuel Dupont, expert-conseiller Transformation de l’action publique et territoires à l’ANCT qui a rappelé son rôle. « L’Agence s’inscrit dans le cadre du soutien à la décentralisation et aux collectivités. Elle mobilise crédits et soutiens pour soutenir en ingénierie les collectivités. »

La valeur sociale de l’eau

N'étant pas "expert de l'eau", il a néanmoins constaté que de plus en plus de collectivités sollicitaient l’Agence sur le sujet. « Certains territoires veulent faire de la transition environnement, d’autres ont des conflits d’usage. Il y a des points de convergence possibles. L’eau est en train de changer de statut ; elle prend de l’importance, a une valeur sociale. Elle concerne beaucoup plus d’acteurs que simplement les consommateurs. » D’où la nécessité de travailler ensemble. Laurence Lemouzy, directrice des études et de l’institut de la Gouvernance Territoriale et de la décentralisation et de la revue Pouvoirs Locaux, a défendu cette idée. « La décision classique n’existe plus. On parle désormais de décider avec. On s’intéresse plus aux liens, qu’aux lieux. La capacité à gouverner l’eau dépend de la capacité à se coordonner à d’autres ; acteurs publics, économiques et citoyens. »

L’eau, une question du quotidien

Pour la directrice scientifique, l’eau s’inscrit pleinement « dans les questions du quotidien » auxquelles répond la commune, qu’elle voit comme « un lieu d’émotion dans lequel on trouve le meilleur niveau d’information ». En cela, elle se distingue de l’intercommunalité « un lieu quasi apolitique, de gestion des flux dans laquelle les élus se doivent d’être des techniciens. » Deux collectivités, deux rôles mais qui ont besoin de l’une et de l’autre. « En dépit des périmètres qui s’élargissent, les régions qui deviennent plus grandes, les intercommunalités, l’eau résiste dans le local" a-t-elle ajouté. 

 Autre mutation et transition : celle de décider grâce au principe de subsidiarité. « La méthode subsidiaire va permettre de mieux appliquer une décision, a précisé Laurence Lemouzy. Nous demandons à l’État de coordonner la santé et la solidarité, d’être soignant, enseignant, d’avoir des services publics qui fonctionnent… Il faut comprendre que cet État-là, c’est avant tout de la puissance publique. L’État et collectivités sont alors dans le même bateau. Elle ne pourra rester puissante que si elle inclut cette diversité d’acteurs. »

L’eau pour construire le monde de demain

La 3e table ronde a ouvert les débats sur le monde de demain et la place de l’eau en plein changement climatique. « De plus en plus de nappes sont à sec. Face à cette accélération, il faut donc se demander comment on réussit à s’adapter pour éviter les dégâts qu’on a pu voir cet été », rappellait Emma Haziza, docteur de l’École des Mines de Paris. Magali Reghezza-Zitt, docteur en géographie et aménagement, membre du haut-commissariat pour le climat, est quant à elle, convaincue qu’une réflexion est à mener sur l’aménagement. « Le levier comportemental n’est qu’un élément parmi tant d’autres. Le changement des comportements est important, mais ne suffit pas. » Nicolas Juillet, copilote de cette table ronde, reste convaincu « qu’au-delà des tuyaux, la gestion publique de l’eau permet de décloisonner les politiques publiques pour porter une vision prospective des territoires face au changement climatique. »

Montrer ce qui est fait

Cette matinée de travail aura été l’occasion de mettre en lumière les exemples pratiques de la gestion publique de l’eau, développés dans les territoires. Et qui sait, d'engager d’autres actions à l’avenir.
« La gestion publique, elle se présente modeste, mais elle fait énormément de choses. Il faut les mettre en mots, en images, valoriser, faire des vidéos, travailler des registres de langage. Les acteurs publics ne mettent pas assez en narration ce qui est fait », incite Laurence Lemouzy. Aux collectivités d'inverser la tendance. 

Hélène Leclerc 

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