Recherche...

Le télétravail questionne aussi le management (partie 1/2)

Retour à la liste des actualités

Le télétravail questionne aussi le management (partie 1/2)

​Dans le cadre des groupes « partenariat des savoirs© » du SNDGCT (lire encadré), le Syndicat s’est rapproché de Randstad1 afin de s’intéresser à la question du télétravail. Cette approche permet de mieux prendre en compte les attentes des salariés, des entreprises et des collectivités, tout en permettant de reposer les fondamentaux de l’organisation et de ses objectifs.

Pour comparer les pratiques entre les acteurs publics et les acteurs privés, une enquête a été menée auprès de dirigeants publics et privés. Parmi les 321 réponses, 235 proviennent du secteur public et 86 du secteur privé.

Une recherche complémentaire, menée par Claire Edey-Gamassou, maîtresse de conférence à l’Université Paris-Est Créteil, permet de rentrer plus finement dans les différences (ou les similitudes) constatées entre le secteur public et le secteur privé.

Les résultats de cette enquête, développée ci-après, montrent une convergence notable entre les réponses issues du privé et les réponses issues du public.

DES ÉTUDES, DES INDICATEURS, MAIS PEU DE RETOURS SUR LA QUESTION DU MANAGEMENT

Aujourd’hui en France, de l’ordre de 15% de la population active est en télétravail, et 20% pourrait être concernée à court terme. 85% de personnes interrogées seraient favorables à la généralisation du télétravail (sondage ODOXA 2015).

Différentes études corroborent l’adhésion, à l’image de celles réalisées par Randstad work monitor en 2015 et 2018. Favorables au télétravail, les trois quarts (72%) des Français hésitent pourtant à sauter le pas. Alors que trois Français sur quatre (76 %) saluent l’assouplissement du cadre juridique relatif au télétravail, qui devrait favoriser son essor, une proportion presque identique de répondants déclare qu’elle n’a pas l’intention de travailler à distance. Selon l’étude, 72 % des répondants disent en effet qu’ils ne comptent pas formuler une demande de télétravail auprès de leur employeur dans les six mois à venir.

Ce résultat paradoxal semble signaler l’hésitation des Français à se saisir d’une évolution à laquelle ils sont pourtant favorables. Le télétravail, en somme, n’est pas encore rentré dans les moeurs.

Il est donc important d’appréhender le retour d’expérience des situations déjà existantes. Le télétravail est en effet appelé à transformer en profondeur les formes actuelles d’organisation du travail.

Le premier constat que l’on peut faire de l’enquête SNDGCT-Randstad, c’est que contrairement aux idées reçues, il y a peu de différences public/privé sur les entités qui ont mis en place le télétravail aujourd’hui :

41,3% dans le public déclarent l’avoir mis en place ou être en cours, pour 46,6% dans le privé.

On peut néanmoins observer que les entreprises sont un peu plus matures que les collectivités et l’ont mis en place depuis plus longtemps. 

S’agissant du nombre de jours télétravaillés, les différences sont minimes. Si le décret du 11 février 2016 autorise jusqu’à 3 jours de télétravail par semaine, la réalité majoritaire est de 1 jour par semaine.

On perçoit cependant dans l’analyse détaillée, que plus l’entité est importante, plus la possibilité d’aller audelà d’un jour télétravaillé augmente.

1 Spécialiste des services en Ressources Humaines, le groupe Randstad France intervient sur toutes les étapes de la vie professionnelle : recrutement, intégration, management, formation et mobilité.

  • Emmanuel GROS, DGS de la ville de Saint Nazaire – membre du bureau national du SNDGC
  • Philippe CORTINA–Direction du Pôle Public Randstad

Avec la contribution de :

  • Claire EDEY-GAMASSOU– Maîtresse de conférence en sciences de gestion à l‘Université Paris-Est Créteil (IUT Créteil-Vitry et Institut de Recherche en Gestion)
  • Jean-Baptiste CLERC, DGS de la ville de Cornebarieux – président régional Midi Pyrénées du SNDGCT
LES PARTENARIATS DES SAVOIRS : LE PARTAGE DES EXPERTISES

Lancés en 2018 par le SNDGCT, les « Partenariats des Savoirs » sont une co-construction entre sphères publiques, privées et universitaires.

Ils s’appuient sur la complémentarité et le partage de leurs expertises et savoirs respectifs pour donner du sens à des sujets majeurs tenant compte des mutations du monde.

Les travaux sont engagés dans le respect constant de valeurs qui font sens pour tout acteur impliqué au service de l’intérêt général : l’efficacité sociale, économique et culturelle ; le bien commun et la place centrale de l’humain ; les notions de durabilité, d’innovation et d’expérimentation.

Plus que la volonté de se diriger vers des « territoires intelligents » (définis au seul niveau des moyens), le SNDGCT et ses partenaires co-construisent autour de l’idée de « territoires sages ». Fondant leur attractivité sur le mariage de frugalité, durabilité et faire-ensemble, ils placent l’humain et le bien commun au centre des réflexions.

TÉLÉTRAVAIL ET MANAGEMENT

On évoque ainsi souvent l’employeur, le télétravailleur, les bénéfices pour l’environnement, mais on oublie la plupart du temps d’évoquer le management et l’effet produit par le télétravail sur celui-ci. Peu de doctrine apparaît disponible sur cet aspect. C’est pourquoi le groupe de travail SNDGCTRandstad a décidé d’explorer cet angle d’analyse, en lien avec l’impact sur l’amélioration de la qualité de vie au travail. Au sein d’une équipe de travail, le télétravail permet en effet aux encadrants d’expérimenter une forme de management plus participative, centrée sur la responsabilisation, l’autonomie, le contrôle par les résultats et le respect des délais. Pour autant, comme le souligne un rapport conjoint des partenaires sociaux du 23 mai 2017, le télétravail bouscule la notion classique de management et de relation hiérarchique et oblige à trouver un juste équilibre entre contrôle du travail et véritable relation de confiance.

Il apparaît nécessaire de donner au manager les moyens de continuer à assumer son rôle de responsable hiérarchique et d’animation d’équipe alors même qu’il travaille à distance de ses collaborateurs (cas où manager et collaborateurs télétravaillent au même moment / cas où seul le manager télétravaille / cas où seuls les collaborateurs télétravaillent).

TÉLÉTRAVAIL : UN FACTEUR D'AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL (QVT) ?

Selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT), 65% des télétravailleurs estiment que le télétravail a des conséquences positives sur leur qualité de vie (BVA-Sémaphores, 2015).

Mais cela peut aussi constituer une menace pour la santé (rapport OIT 2017). En effet, en ce qui concerne les effets positifs du télétravail, les travailleurs signalent une réduction du temps de déplacement, une plus grande autonomie quant au temps de travail permettant davantage de flexibilité en termes d’organisation du temps de travail, un meilleur équilibre global entre la vie professionnelle et la vie privée et une productivité accrue. Les entreprises, comme les collectivités, tirent profit, d’une part, de l’amélioration de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, qui peut entraîner une plus grande motivation, une réduction de l’absentéisme, une rotation du personnel moindre et une productivité et une efficacité accrues, et, d’autre part, d’une réduction de l’espace de bureaux nécessaire et des coûts y afférents.

Les inconvénients du télétravail sont la tendance à induire un allongement de la durée du travail, à créer un chevauchement entre le travail salarié et la vie privée (interférence entre la vie professionnelle et familiale), et à entraîner une intensification du travail. Les télétravailleurs à domicile semblent signaler un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée tandis que les travailleurs « hautement mobiles » sont plus exposés au risque de conséquences négatives sur la santé et le bien-être. Les formes partielles et occasionnelles de télétravail semblent présenter un bilan plus positif entre les avantages et les inconvénients. L’enquête SNDGCT-Randstad montre que l’amélioration de la qualité de vie correspond à l’appréhension générale du dispositif. Les collectivités visent en effet majoritairement l’amélioration de la qualité de vie au travail.

Concernant les objectifs de la mise en oeuvre du télétravail, parmi les quatre principales raisons, seule « Améliorer la QVT » fait l’objet de différence statistiquement significative entre le public (30,90% sur 97 répondants) et le privé (12,50% sur 40 répondants). Elle est la principale raison dans les collectivités alors qu’elle n’est que la 3e raison principale dans le privé, à égalité avec « un choix de la direction » (5 répondants sur 40).

Pour les trois autres raisons principales (voir tableau ci-après), il n’y a pas de différence significative entre public et privé.


​Principales raisons de la mise en place du télétravail (137 répondants, public et privé)
​À la demande des agents/salariés​28%
​Pour raison organisationnelles​15%
​Pour faire évoluer les pratiques managériales​9%

Pour le privé, l’objectif d’améliorer la qualité de vie au travail n’apparaît pas une priorité, en tout cas de façon structurelle.

L’idée reçue que les entreprises font plus attention à cet aspect que le secteur public semble donc battu en brèche. La mesure est cependant mise en place « à la demande des salariés » qui, eux, visent (sans doute) cet objectif les concernant.

Malgré le fait que le télétravail soit majoritairement mis en place à la demande des salariés, le privé met la mesure « équilibre vie professionnelle/vie personnelle » en second plan derrière celle sur les conditions de travail. Cet indicateur est en effet lié à la responsabilité employeur, sujet prégnant sous le prisme juridique.

De manière générale peu d’indicateurs semblent mis en place.

Ainsi, 39.4% des collectivités indiquent n’en avoir aucun, pour 51.3% dans le privé. Cette différence est en soi instructive et montre que le secteur public semble en avance sur la dimension pilotage.

Quels que soient les angles, les organismes (citistats pour le compte du CGET, observatoire de l’ergostressie (OBERGO) ou le moment des enquêtes, les résultats sont convergents et le télétravail impacte ainsi favorablement la qualité de vie au travail, l’équilibre des temps de vie et par conséquent, l’égalité femme homme.

Suite et fin de l’article à retrouver dans le prochain numéro d’ID Efficience Territoriale

Retour à la liste des actualités