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La communication en période pré-électorale : Prudence et maîtrise

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La communication en période pré-électorale : Prudence et maîtrise

​Avant les élections municipales de mars 2020, les collectivités entrent, en matière de communication institutionnelle, dans une période à risque avec deux grands domaines de vigilance : l’interdiction de toute aide de la collectivité au candidat (article L52-8 du code électoral) et l’interdiction de toute campagne de promotion (article L.52-1 al2 du code électoral). Des règles visant à assurer une égalité de traitement des candidats, en interdisant l’utilisation des moyens publics aux élus sortants candidats à leur succession.

Six mois avant les élections - soit à partir du 1er septembre 2019-, les actions de communication des communes et des EPCI sont encadrées. C’est ce qu’on appelle la période de réserve. « Cette période de réserve impacte donc forcément notre fonction de DG dans notre rôle paradoxal de garant de la légalité et facilitateur de l’action municipale », explique Florence Bacco-Ambrass, Vice-Présidente nationale en charge de la « Vie du Syndicat – Communication » et DGS de la Ville de Palaiseau.

INTERDICTION D’UTILISER LES MOYENS DE LA COLLECTIVITÉ

Article L52-8 du code électoral Les personnes morales ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d’un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, des services ou autres avantages directs ou indirects à des prix qui sont inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués. « C’est une règle que nous devons respecter, période de réserve ou pas. Mais il n’est pas inutile de rappeler qu’elle s’applique à la fourniture de matériel (fournitures, photographie, voiture) ou de moyens humains (agents de la mairie y compris le cabinet) et qu’elle justifie l’interdiction de l’attribution d’une salle à titre exclusif d’un candidat (égalité des candidats). »

INTERDICTION DES CAMPAGNES DE PROMOTION PUBLICITAIRE DES RÉALISATIONS OU DE LA GESTION D’UNE COMMUNE

Article L52-1 alinéa 2 du code électoral À compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. « Aucune disposition ne contraint le maire à cesser ses actions de communication à l’approche des élections. Néanmoins, sa communication ne doit pas être constitutive d’une propagande électorale en faveur d’une liste. » 

QU’EST-CE-QUE L’INTERDICTION DE PROPAGANDE DES RÉALISATIONS ET DE LA GESTION D'UNE COLLECTIVITÉ ?

Il y a campagne de promotion quand l’initiative de communication devient un instrument de promotion des réalisations d’une municipalité et de ses élus. C’est pourquoi, la communication institutionnelle de la collectivité doit faire l’objet d’une très grande prudence. Tout ce qui relève de l’information pure des administrés, de l’exercice normal des compétences, des services publics qui leur sont proposés restent admis, dans le respect de 4 principes. En revanche, toute communication mettant en valeur la personnalité des candidats, leurs réalisations, leurs projets, dressant un bilan de l’action menée, etc … s’apparente à un moyen de propagande.

LE CHAMP D’APPLICATION

L’article L. 52-1 2e alinéa du Code électoral s’étend à tous les supports de communication, internes ou externes, ou les événements : bulletin municipal avec l’édito de l’exécutif et les tribunes politiques, affiches, flyers, photographies, cartes de vœux, courriers, inaugurations, discours prononcés lors d’évènements, site Internet de la collectivité, modes de communication électroniques : blogs, twitter, FB. Ainsi, toute « campagne de promotion » dont le juge estime qu'elle présente une interférence avec une campagne électorale est susceptible de tomber sous le coup de l'interdiction formulée par l'article L. 52-1, deuxième alinéa, du code électoral.

LES PRINCIPES JURISPRUDENTIELS

La jurisprudence a défini 4 grands principes dont le respect permet de poursuivre en toute légalité la communication. Ces critères cumulatifs sont les suivants : -La neutralité. Il constitue le principe le plus important à respecter. La communication peut évoquer la vie locale mais ne doit pas faire référence aux élections à venir ou mettre en avant les actions du candidat sortant. Elle se doit d’être seulement informative, neutre sans propagande ou polémique électorale. -L’antériorité. La collectivité peut continuer à communiquer via ses outils de communication habituels (bulletins municipaux, site internet…), à organiser des manifestations, des cérémonies à la condition que ces dernières aient un caractère traditionnel, et ne soient pas assorties d’actions destinées à influencer les électeurs. -La régularité. La périodicité de la communication ou de l’événement ne doit pas être modifiée en raison des élections. -L’identité. Les différents moyens de communication ne doivent pas connaître de modifications avantageuses de l’aspect, de la présentation, ou des rubriques présentées. 

QUELQUES APPLICATIONS PRATIQUES TIRÉES DE LA JURISPRUDENCE PUBLICATIONS 

Aucune disposition juridique n’empêche les collectivités d’assurer l’information de leurs administrés sur la vie de la commune au travers des bulletins municipaux. Leur diffusion peut continuer au rythme habituel. Leur antériorité et régularité doivent pouvoir justifier leur parution à des périodicités identiques et sans rapport avec le calendrier électoral. Quant au contenu, la neutralité des bulletins municipaux est strictement appréciée par le juge qui s’assure que le style rédactionnel soit objectif et informatif.

CARTES DE VŒUX 

Il a été admis, qu’une carte de vœux soit envoyée aux administrés par les élus sortants dès lors qu’il s’agit d’un envoi traditionnel dont le contenu se situe très directement dans le prolongement des cartes adressées les années précédentes et que la carte ne contient aucune allusion, ni aux réalisations de la collectivité, ni aux prochaines élections.

CÉRÉMONIE DES VŒUX 

Si la collectivité a l’habitude d’organiser une cérémonie des vœux chaque année à la même période (régularité, antériorité), qu’elle n’entend pas en modifier la forme en janvier 2020 (critère d’identité) et que les intervenants en particulier le maire se contentent d’évoquer strictement la vie locale, sans prosélytisme électoral, et en adoptant un ton neutre (critère de neutralité), la loi électorale est respectée.

INAUGURATIONS ET VISITES 

L’inauguration d’un équipement réalisé par la collectivité est généralement la suite logique de l’achèvement des travaux. Elle a lieu normalement à une date fixée à l’avance. Dans ce cas le juge se montre compréhensif. Le juge sera amené à vérifier si la date n’a pas volontairement été anticipée ou retardée afin d’influer sur l’élection. L’inauguration doit avoir lieu à l’occasion d’évènements précis (peu de temps après la fin des travaux, pose de la première pierre, ouverture au public) et non pas en pleine phase de travaux ou trop longtemps après son ouverture.

RÉUNIONS ET CÉRÉMONIES 

Les élus et notamment le maire peuvent continuer de représenter la collectivité lors de réunions publiques (conseils de quartier, rencontres avec les habitants) dès lors qu’il s’agissait d’une pratique habituelle dans la commune. Il ne faut néanmoins pas changer de format, changer leurs conditions, et d’éviter toute allusion au prochain scrutin et toute promotion des réalisations de la commune.

SITE INTERNET 

Le site internet obéit aux mêmes règles en matière de communication pré-électorale que les autres supports de communication. Les 4 critères sont transposables dans les mêmes termes : information neutre ; ne pas se référer au prochain scrutin ; ne pas relayer des thèmes de campagne de façon à valoriser une liste ; plus globalement ne pas valoriser les réalisations et projets de l’équipe municipale sortante.

LES AUTRES MOYENS DE COMMUNICATION ÉLECTRONIQUES (FB, BLOG, TWITTER) 

L’ensemble des comptes sur les réseaux sociaux des communes peut être maintenu en période pré-électorale mais leur utilisation est très encadrée. Il est recommandé de les transformer en simples « vitrines » dénuées de références aux prochaines échéances électorales et se limiter à des informations descriptives.

LES SANCTIONS ENCOURUES EN CAS DE NON-RESPECT DES DISPOSITIONS CONCERNÉES DU CODE ÉLECTORAL

Il appartient au juge électoral d’apprécier souverainement le respect de toutes ces règles. Il s’attache à vérifier, notamment :

 L’écart de voix entre les listes.

 Le respect du principe d’égalité des candidats. 

 Le degré de propagande.

 La bonne foi des candidats. 

 Le contenu des informations diffusées. 

 L’impact du message diffusé sur l’électeur.

Les sanctions encourues dépendent de la nature et du degré de gravité de l’irrégularité constatée.

SANCTIONS ÉLECTORALES 

Annulation du scrutin. Le juge de l’élection (tribunal administratif en 1ère instance) peut prononcer l’annulation de l’élection, notamment en cas de faible écart entre les voix. Le juge va vérifier si le non-respect de la loi électorale a eu pour conséquence d’altérer ou non la sincérité ou non du scrutin. Si l’écart de voix est significatif et que la fraude est importante, le juge pourra être amené à prononcer l’inéligibilité du candidat plutôt que l’annulation du scrutin.

INÉLIGIBILITÉ DU CANDIDAT

L’inéligibilité du candidat élu peut être prononcée notamment en cas de dépassement du plafond des dépenses électorales ou lorsque le compte de campagne a été rejeté. La durée de l’inéligibilité peut atteindre 3 ans maximum.

SANCTIONS FINANCIÈRES 

Le juge peut décider la réintégration dans les comptes de campagne de dépenses de communication réalisées avec les moyens des collectivités publiques.

Une telle incorporation des dépenses mises en cause au sein du compte de campagne du candidat peut engendrer un dépassement du plafond des dépenses électorales. En application des dispositions de l’article L.234 du code électoral, le juge de l'élection pourrait ainsi prononcer l'inéligibilité du candidat.

SANCTIONS PÉNALES
- Peine d’emprisonnement. 

Article L113-1. « Sera puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende tout candidat, en cas de scrutin uninominal ou binominal, ou tout candidat tête de liste, en cas de scrutin de liste, qui : 1° Aura bénéficié, sur sa demande ou avec son accord exprès, d'affichages ou de publicité commerciale ne respectant pas les articles L. 51 et L. 52-1 ; ». -Amende. Un candidat tête de liste condamné pour avoir mené une campagne de promotion publicitaire de la gestion d’une collectivité dans les 6 mois précédant le scrutin encourt une amende de 75 000 €.




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